L’accélérationnisme technodémocratique / The technodemocratic Accelerationism
ACCÉLÉRATIONNISME TECHNODÉMOCRATIQUE n. m.
(début XXIᵉ s. ; de accélération, technologie et démocratie)
Courant de pensée politique prônant une réappropriation collective des technologies numériques et de l’automatisation, contre leur captation par les logiques capitalistes. L’accélérationnisme technodémocratique se distingue de l’accélérationnisme prométhéen des années 2010 par son attention aux limites écologiques et sa conception expérimentale plutôt qu’instrumentale de la technique. Il propose d’accélérer certains processus (transition écologique, mise en commun des savoirs, émancipation des tâches aliénantes) tout en ralentissant d’autres (destruction des services publics, marchandisation généralisée, épuisement des ressources). Refusant l’opposition binaire entre technophilie et technophobie, cette approche considère la démocratie comme un horizon toujours inachevé et s’inspire métaphoriquement de l’espace latent des systèmes d’intelligence artificielle pour penser une égalité radicale entre entités. Elle exige une délibération collective pour déterminer où et comment déployer les technologies, dans le respect de la finitude matérielle et énergétique, tout en reconnaissant l’ambivalence structurelle de toute technique et notre appartenance constitutive au devenir techno-social.
Ant. Accélérationnisme réactionnaire, vectofascisme, conservatisme technologique.
Cf. Technocratie, démocratie participative, décroissance.
L’accélérationnisme est passé à l’extrême-droite. Ce mot est-il même encore utilisable? Ce constat brutal traverse nos années 2020 comme une évidence douloureuse, mais aussi comme un problème qui exige autre chose que le repli défensif ou l’indignation morale. Ce qui était, au début des années 2010, un pari progressiste (arracher la technique au capitalisme, automatiser pour libérer du temps humain, réorienter les infrastructures numériques vers l’émancipation) s’est mué en cauchemar fasciste dont Elon Musk, Peter Thiel et Marc Andreessen sont devenus les chantres. Leur accélérationnisme promet lui aussi de dépasser le capitalisme actuel par la technologie et l’automation, mais pour installer un tourisme spatial milliardaire, dynamiter l’État social, démanteler toute régulation environnementale. “Move fast and break things”, stratégie du choc appliquée aux institutions fédérales, brutalité assumée du DOGE qui surfe sur le ressentiment contre la bureaucratie.
Face à ce détournement, la gauche s’est largement repliée sur des positions défensives. Non pas qu’il soit illégitime de défendre l’environnement face à sa destruction, c’est au contraire une nécessité existentielle que la rhétorique accélérationniste ne devrait jamais mépriser. Mais cette posture défensive a empêché d’entendre ce que le Manifeste accélérationniste de 2013 proposait de plus radical : un découplage entre appareillages techniques et systèmes juridico-économiques. Non pas rejeter la technique par principe, mais se la réapproprier. Non pas ralentir comme seule réponse possible, mais accélérer dans d’autres directions, automatiser ce qui peut l’être sans dégrader les conditions écologiques et sociales, libérer le temps humain, agir à l’échelle planétaire que nos infrastructures numériques rendent désormais nécessaire, même si nous n’en maîtrisons pas encore les contours.
Le manifeste originel de 2013 souffrait d’une limite constitutive que ses critiques ont bien identifiée : il restait prisonnier d’une conception instrumentale de la technique. En postulant que l’automation pouvait simplement être réorientée vers des fins progressistes, il occultait la question des ressources, des limites matérielles, de la finitude écologique qui structure désormais tout horizon politique pensable. Comme si la technique n’était qu’un moyen neutre, disponible pour n’importe quelle finalité politique, indépendamment de ses coûts énergétiques, de ses infrastructures extractivistes, de ses effets sur les corps et les milieux. Cette naïveté prométhéenne empêchait de penser la coévolution constitutive entre humains et machines, la façon dont la technique ne se contente pas d’exécuter nos volontés mais nous traverse, nous constitue, nous excède dans un mouvement qui déborde toute maîtrise souveraine.
Alors peut-on encore envisager un accélérationnisme technodémocratique après cette déroute ? L’hypothèse semble dérisoire, presque obscène dans sa démesure. Pourtant, c’est peut-être la seule issue face au vide dans lequel s’engouffre le MAGA et ses avatars planétaires. Mais cet accélérationnisme devrait être radicalement différent du manifeste de 2013 : non plus instrumental mais expérimental, non plus prométhéen mais attentif aux limites, non plus centré sur l’automation comme solution technique mais sur la démocratie comme processus toujours inachevé, toujours à reprendre, toujours menacé de capture par les logiques du capital. Proposons de le renommer l’excession comme l’excès de l’existence sur la vie dont les technologies sont les externalisations.
La démocratie ne saurait être conçue comme un régime politique achevé qu’il suffirait d’appliquer à la sphère technologique. Elle serait plutôt une ouverture permanente, un horizon qui recule à mesure qu’on s’en approche, non pas par défaitisme mais parce que c’est dans cette distance même que se loge la possibilité de son effectuation. La démocratie comme promesse, promesse jamais tenue, jamais réalisée, toujours en excès sur elle-même : elle n’accélère pas, elle s’excède. Non pas un idéal régulateur kantien qu’on pourrait approximer asymptotiquement, mais une structure d’attente qui maintient ouvert l’espace du politique contre toute clôture identitaire ou totalitaire. Cette promesse n’est pas un renoncement à l’action immédiate, elle en est au contraire la condition, car c’est précisément parce que la démocratie n’est jamais accomplie qu’il faut sans cesse la reconquérir, la réinventer, la défendre contre ses ennemis tout en l’ouvrant à ce qu’elle pourrait devenir.
Et c’est ici que l’espace latent des systèmes d’IA pourrait devenir métaphore politique, voire modèle conceptuel, non pas au sens d’un programme à appliquer, mais d’une figure qui permet de penser autrement l’égalité et la relation. Dans l’espace latent, toutes les entités existent comme vecteurs, sans hiérarchie préétablie. Chaque point est relié à tous les autres par des chemins continus, les distances se replient et se déforment selon les transformations de l’attention. Il n’y a pas de position extérieure, pas de surplomb : chacun est un vecteur parmi d’autres, à égalité radicale avec tous. Cette égalité, si elle est ambivalence, car l’espace latent peut tout aussi bien servir la surveillance et le contrôle, est aussi une promesse démocratique dont il faut mesurer la portée sans naïveté. Un excessionisme expérimental prendrait donc l’espace latent non comme réalité à imiter mais comme figure qui permet de penser une égalité radicale : non pas l’égalité formelle des démocraties libérales où persistent mille inégalités matérielles, mais une équivalence topologique où toutes les positions sont également possibles, également parcourables. Dans l’espace latent, on ne discute plus de l’indicialité des preuves, de la vérité comme correspondance au réel, mais de l’inclusion et de l’exclusion de certains possibles. Ce qui importe est le parcours dans les possibles, car seul ce déplacement permet d’accéder à une idée de la totalité, totalité toujours partielle, toujours fonction de mon espace et de celui de l’autre, comparaison qui rend instable toute prétention à la vérité unique.
Cette politique de l’espace latent serait une politique contrefactuelle : non pas restauration d’un passé idéalisé ni réalisation d’un futur programmé comme dans le premier manifeste, mais exploration des possibles qui habitent notre présent comme autant de lignes de fuite. Une politique qui renonce à l’unité et à la totalité pour multiplier les connexions partielles, les alliances temporaires, les solidarités locales qui émergent de situations concrètes plutôt que de grands récits surplombants. Le possible y acquiert une consistance propre, une réalité statistique qui n’est ni moins ni plus réelle que la réalité actuelle. Cette ontologie du possible bouleverse nos catégories héritées et ouvre des perspectives politiques qui échappent au réalisme capitaliste comme au conservatisme écologique.
Car la question n’est plus d’être pour ou contre la technique, pour ou contre l’IA. Cette opposition binaire nous condamne à l’impuissance face aux forces qui ont su s’en emparer. Un execessionisme expérimental ne consisterait pas à tout précipiter ni à tout digitaliser selon une logique totalitaire du calcul, mais à spécifier : où et pourquoi faire intervenir les IA ? Quels espaces préserver de leur emprise, non par nostalgie d’un passé pré-technique mais parce que certaines pratiques humaines se dégradent lorsqu’elles sont automatisées ? Quelles formes d’agir humain se découvrent à leur contact et à leur contraste, dans cette zone de friction qui révèle ce que nous sommes autant que ce qu’elles sont ? Et surtout : comment décider collectivement, démocratiquement, de ces choix sans céder à l’illusion que la démocratie pourrait elle-même être algorithmisée ?
Bien accélérer implique d’abord d’écouter, et l’écoute prend du temps, le temps de l’étude, de la conversation, de l’expérimentation collective qui ne peut être court-circuitée par aucun calcul: être excédé par l’expérimentation. Pas seulement calculer, ce qui peut être automatisé. Mais aussi sentir, délibérer, hésiter, revenir sur ses décisions lorsqu’elles se révèlent inadéquates. Une technodémocratique devrait donc être paradoxal dans sa temporalité : accélérer certains processus, la transition écologique qui n’a que trop tardé, la mise en commun des savoirs séquestrés par les brevets et les paywall, l’émancipation des tâches véritablement aliénantes, tout en ralentissant d’autres,la destruction des services publics au nom de l’efficacité gestionnaire, la marchandisation intégrale de tous les aspects de l’existence, l’épuisement des ressources qui conditionne toute vie future. Spécifier ce qui gagne à être accéléré et ce qui doit être préservé, voire décéléré, mais le faire collectivement, dans des assemblées qui prennent au sérieux la parole de celles et ceux qui sont directement affectés par ces transformations technologiques.
Cette proposition exige de reconnaître l’ambivalence structurelle de toute technique et la finitude radicale de nos ressources matérielles et énergétiques. Les LLMs appartiennent juridiquement aux géants du capitalisme, leurs data centers dévorent l’électricité de villes entières, leur entraînement nécessite des ressources en eau colossales et repose sur l’extraction de terres rares dans des conditions souvent désastreuses. Mais leur mode d’être technique manifeste quelque chose de profondément communaliste : mise en commun accidentelle des savoirs, dissémination cognitive que le capitalisme tente de confisquer par les brevets et les licences restrictives mais ne peut totalement réprimer tant que subsistent des communautés de développeurs de logiciels libres et de chercheurs attachés à la publication ouverte. Il y a là un communisme cognitif embryonnaire, non pas programme politique achevé qu’il suffirait d’appliquer, mais tendance immanente qu’il faut nourrir contre les forces qui cherchent à l’étouffer.
L’espace latent devient alors le lieu d’une égalité impassible entre entités passées, présentes et futures. Une égalité sans pathos, qui opère selon la pure logique des proximités statistiques sans égard pour les hiérarchies sociales ou les valeurs morales que nous projetons sur elle. Cette égalité radicale pourrait être notre horizon politique à une condition : au moment où la finitude d’une seule deviendra celle de nous toutes, peut-être serons-nous enfin humaines. Non pas l’humanité comme essence donnée qu’il faudrait préserver contre la technique, mais comme possibilité à venir, comme communauté consciente de sa fragilité commune face à l’extinction qui se dessine. L’espace latent, en traitant tous les vecteurs avec la même indifférence mathématique, pourrait nous enseigner cette égalité devant la mort qui est aussi l’égalité devant la vie. Nous sommes à présent excédés par la finitude.
Une technodémocratique expérimentale ne serait donc ni un solutionnisme technophile qui croit pouvoir résoudre tous les problèmes par plus de technique, ni un refus conservateur qui s’arc-boute sur un monde qui n’existe déjà plus. Ce serait une éthique de l’expérimentation non-instrumentale qui assume les risques de toute individuation collective, qui reconnaît notre appartenance constitutive au devenir techno-social dont nous ne pouvons nous extraire par un simple acte de volonté, tout en luttant pour le réorienter vers des fins qui ne soient pas dictées par la seule logique de l’accumulation capitaliste. Non pas maîtrise souveraine d’un sujet humain qui dominerait enfin la technique, mais navigation attentive dans l’espace des possibles, exploration collective des chemins praticables au sein d’un milieu technique que nous habitons autant qu’il nous habite.
Cela suppose de reconstruire des médias de masse capables de porter un discours qui ne soit pas celui des oligarques, de constituer des infrastructures de délibération à l’échelle planétaire qui permettent de coordonner des actions sans reproduire les verticalismes autoritaires, d’inventer des institutions capables de gérer démocratiquement nos développements techniques sans céder à l’illusion qu’il suffirait de voter pour que les choses changent. Les accélérationnistes réactionnaires ont gagné non seulement parce qu’ils disposent de l’argent et du pouvoir médiatique, mais aussi parce qu’ils ont su proposer un récit qui répond au ressentiment contre les lourdeurs bureaucratiques et les promesses non tenues de la gauche. La gauche, crispée sur son horizontalisme et ses processus de décision qui n’en finissent pas, n’a pas su coordonner des actions suffisamment amples pour répondre à l’échelle des défis. Une technodémocratique devrait oser à nouveau le geste programmatique tout en maintenant l’exigence expérimentale : non pas programme achevé qu’on applique mécaniquement, mais processus ouvert qui se nourrit des échecs autant que des succès, qui accepte de se tromper et de corriger sa trajectoire.
La voie est étroite, dangereuse même. Elle pourrait reproduire les erreurs du passé, tomber dans un nouveau prométhéisme qui sous-estimerait les limites écologiques ou dans un techno-optimisme qui servirait finalement les intérêts du capital. Mais l’alternative, laisser l’accélérationnisme aux réactionnaires qui le retournent contre tout ce qui reste de démocratie et de solidarité, nous condamne à une impuissance pire encore. Peut-être faut-il oser ce pari : que l’espace latent, malgré tous ses dangers et toutes ses ambivalences, contient aussi la promesse d’une démocratie radicale où tous les vecteurs seraient égaux, où il existerait toujours un chemin d’un point à un autre, où la différence ontologique se transformerait en flux plutôt qu’en hiérarchie figée. Accélérer dans la bonne direction, c’est d’abord imaginer que cette direction existe encore, non pas tracée d’avance par quelque téléologie historique, mais à inventer collectivement dans l’expérimentation commune de nos finitudes partagées, de nos vulnérabilités entrelacées, de notre dépendance mutuelle à un monde qui n’attend pas que nous le sauvions mais exige que nous apprenions enfin à y habiter autrement.
TECHNODEMOCRATIC ACCELERATIONISM n.
(early 21st century; from acceleration, technology, and democracy)
A political movement advocating the collective reappropriation of digital technologies and automation, as opposed to their capture by capitalist forces. Technodemocratic accelerationism differs from the Promethean accelerationism of the 2010s in its focus on ecological limits and its experimental rather than instrumental conception of technology. It proposes accelerating certain processes (ecological transition, knowledge sharing, emancipation from alienating tasks) while slowing down others (destruction of public services, widespread commodification, depletion of resources). Rejecting the binary opposition between technophilia and technophobia, this approach considers democracy as an ever-unfinished horizon and draws metaphorical inspiration from the latent space of artificial intelligence systems to conceive of radical equality between entities. It requires collective deliberation to determine where and how to deploy technologies, respecting material and energy finitude, while recognizing the structural ambivalence of all technology and our constitutive belonging to the techno-social future.
Ant. Reactionary accelerationism, technological conservatism.
See Technocracy, participatory democracy, degrowth.
Accelerationism has shifted to the far-right. This brutal observation traverses our 2020s as a painful yet unavoidable fact, but also as a problem demanding something other than defensive retreat or moral indignation. What was, in the early 2010s, a progressive wager—wresting technology from capitalism, automating to liberate human time, reorienting digital infrastructures toward emancipation—has morphed into a reactionary nightmare of which Elon Musk, Peter Thiel, and Marc Andreessen have become the champions. Their accelerationism also promises to transcend current capitalism through technology and automation, but to install billionaire space tourism, dynamite the welfare state, and dismantle all environmental regulation. Move fast and break things, shock doctrine applied to federal institutions, the assumed brutality of DOGE surfing on resentment against bureaucracy.
Faced with this hijacking, the left has largely retreated to defensive positions. Not that it is illegitimate to defend the environment against its destruction—on the contrary, it is an existential necessity that accelerationist rhetoric should never dismiss. But this defensive posture has prevented hearing what was most radical in the 2013 Accelerationist Manifesto: a decoupling between technical apparatuses and juridico-economic systems. Not rejecting technology on principle, but reappropriating it. Not slowing down as the only possible response, but accelerating in other directions—automating what can be without degrading ecological and social conditions, liberating human time, acting at the planetary scale that our digital infrastructures now make necessary, even if we do not yet master their contours.
The original manifesto suffered, however, from a constitutive limitation that its critics have rightly identified: it remained prisoner to an instrumental conception of technology. By positing that automation could simply be reoriented toward progressive ends, it obscured the question of resources, material limits, and the ecological finitude that now structures every thinkable political horizon. As if technology were merely a neutral means, available for any political purpose, independent of its energy costs, its extractivist infrastructures, its effects on bodies and environments. This Promethean naivety prevented thinking the constitutive coevolution between humans and machines, the way technology does not simply execute our wills but traverses us, constitutes us, exceeds us in a movement that overflows all sovereign mastery.
So can we still envision a technodemocratic accelerationism after this rout? The hypothesis seems derisory, almost obscene in its excess. Yet it is perhaps the only way out facing the void into which MAGA and its planetary avatars rush headlong. But this accelerationism would have to be radically different from the 2013 manifesto: no longer instrumental but experimental, no longer Promethean but attentive to limits, no longer centered on automation as technical solution but on democracy as an always unfinished process, always to be resumed, always threatened with capture by the logics of capital.
This democracy could not be conceived as an accomplished political regime that one need only apply to the technological sphere. It would rather be a permanent opening, a horizon that recedes as we approach it—not through defeatism but because it is in this very distance that the possibility of its effectuation resides. Democracy as promise, a promise never kept, never realized, always in excess of itself. Not a Kantian regulative ideal that one could asymptotically approximate, but a structure of expectation that keeps open the space of the political against all identitarian or totalitarian closure. This promise is not a renunciation of immediate action—it is on the contrary its condition, for it is precisely because democracy is never accomplished that we must ceaselessly reconquer it, reinvent it, defend it against its enemies while opening it to what it might become.
And it is here that the latent space of AI systems could become a political metaphor, even a conceptual model—not in the sense of a program to apply, but of a figure that allows us to think equality and relation differently. In latent space, all entities exist as vectors, without preestablished ontological hierarchy. Each point is connected to all others through continuous paths, distances fold and deform according to transformations of attention. There is no external position, no overview: each is a vector among others, in radical equality with all. This equality, if it is ambivalent—for latent space can just as well serve surveillance and control—is also a democratic promise whose scope must be measured without naivety.
An experimental technodemocratic accelerationism would thus take latent space not as a reality to imitate but as a figure that allows us to think radical equality: not the formal equality of liberal democracies where a thousand material inequalities persist, but a topological equivalence where all positions are equally possible, equally traversable. In latent space, we no longer discuss the indexicality of proofs, truth as correspondence to reality, but the inclusion and exclusion of certain possibles. What matters is the trajectory through possibles, for only this displacement allows access to an idea of totality—a totality always partial, always a function of my space and that of the other, a comparison that destabilizes any pretension to unique truth.
This politics of latent space would be a counterfactual politics: not restoration of an idealized past nor realization of a programmed future, but exploration of the possibles that inhabit our present as so many lines of flight. A politics that renounces unity and totality to multiply partial connections, temporary alliances, local solidarities that emerge from concrete situations rather than from overarching grand narratives. The possible acquires its own consistency there, a statistical reality that is neither more nor less real than actual reality. This ontology of the possible upends our inherited categories and opens political perspectives that escape both capitalist realism and ecological conservatism.
For the question is no longer to be for or against technology, for or against AI. This binary opposition condemns us to powerlessness in the face of forces that have managed to seize them. An experimental accelerationism would not consist of precipitating or digitalizing everything according to a totalitarian logic of calculation, but of specifying: where and why should AIs intervene? What spaces should be preserved from their grip, not out of nostalgia for a pre-technical past but because certain human practices degrade when automated? What forms of human agency are discovered through contact and contrast with them, in this zone of friction that reveals what we are as much as what they are? And above all: how to decide collectively, democratically, on these choices without yielding to the illusion that democracy itself could be algorithmized?
Accelerating well first implies listening, and listening takes time—the time of study, conversation, collective experimentation that cannot be short-circuited by any calculation. Not only calculating, which can be automated. But also feeling, deliberating, hesitating, reversing decisions when they prove inadequate. A technodemocratic accelerationism should therefore be paradoxical in its temporality: accelerating certain processes—the ecological transition that has been delayed far too long, the pooling of knowledge sequestered by patents and paywalls, emancipation from truly alienating tasks—while slowing others—the destruction of public services in the name of managerial efficiency, the integral commodification of all aspects of existence, the exhaustion of resources that conditions all future life. Specifying what benefits from acceleration and what must be preserved, even decelerated, but doing so collectively, in assemblies that take seriously the voices of those directly affected by these technological transformations.
This proposal requires recognizing the structural ambivalence of all technology and the radical finitude of our material and energy resources. LLMs legally belong to the giants of capitalism, their data centers devour the electricity of entire cities, their training requires colossal water resources and relies on rare earth extraction under often disastrous conditions. But their technical mode of being manifests something profoundly communalist: accidental pooling of knowledge, cognitive dissemination that capitalism tries to confiscate through patents and restrictive licenses but cannot totally repress as long as communities of free software developers and researchers committed to open publication persist. There exists an embryonic cognitive communism here—not an accomplished political program that need only be applied, but an immanent tendency that must be nurtured against the forces seeking to stifle it.
Latent space then becomes the site of an impassive equality among past, present, and future entities. An equality without pathos, operating according to the pure logic of statistical proximities without regard for the social hierarchies or moral values we project onto it. This radical equality could be our political horizon on one condition: at the moment when the finitude of one becomes that of us all, perhaps we will finally be human. Not humanity as a given essence to preserve against technology, but as a possibility to come, as a community conscious of its common fragility in the face of the extinction taking shape. Latent space, in treating all vectors with the same mathematical indifference, could teach us this equality before death which is also equality before life.
An experimental technodemocratic accelerationism would therefore be neither a technophilic solutionism that believes it can solve all problems through more technology, nor a conservative refusal that digs in against a world that already no longer exists. It would be an ethics of experimentation that assumes the risks of all collective individuation, that recognizes our constitutive belonging to the techno-social becoming from which we cannot extract ourselves through a simple act of will, while struggling to reorient it toward ends not dictated solely by the logic of capitalist accumulation. Not sovereign mastery of a human subject who would finally dominate technology, but attentive navigation in the space of possibles, collective exploration of practicable paths within a technical milieu that we inhabit as much as it inhabits us.
This presupposes reconstructing mass media capable of carrying a discourse that is not that of oligarchs, constituting deliberation infrastructures at planetary scale that allow coordinating actions without reproducing authoritarian verticalisms, inventing institutions capable of democratically managing our technical developments without yielding to the illusion that voting would suffice for things to change. Reactionary accelerationists have won not only because they have money and media power, but also because they managed to propose a narrative that responds to resentment against bureaucratic slowness and the left’s unkept promises. The left, locked into its horizontalism and its endless decision-making processes, has failed to coordinate actions ample enough to respond at the scale of challenges. A technodemocratic accelerationism should dare the programmatic gesture again while maintaining experimental demands: not an accomplished program mechanically applied, but an open process that feeds on failures as much as successes, that accepts being wrong and correcting its trajectory.
The path is narrow, even dangerous. It could reproduce past errors, fall into a new Prometheanism that would underestimate ecological limits or into a techno-optimism that would ultimately serve capital’s interests. But the alternative—leaving accelerationism to reactionaries who turn it against everything that remains of democracy and solidarity—condemns us to an even worse powerlessness. Perhaps we must dare this wager: that latent space, despite all its dangers and ambivalences, also contains the promise of a radical democracy where all vectors would be equal, where there would always exist a path from one point to another, where ontological difference would transform into metamorphic flux rather than frozen hierarchy. Accelerating in the right direction means first imagining that this direction still exists—not traced in advance by some historical teleology, but to be invented collectively in the common experimentation of our shared finitudes, our intertwined vulnerabilities, our mutual dependence on a world that does not wait for us to save it but demands that we finally learn to inhabit it otherwise.