Gilles Deleuze Cours du 17.11.81 [2B (502)]

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Gilles Deleuze Cours du 17.11.81 [2B (502)] transcription : Lucie Marchadié

– Gilles Deleuze : « Or cette possibilité de réunion division qui appartient à la notion de flux, elle dépend de quoi sur les trois flux du flux de ma vie intérieure ? C’est mon monologue intérieur qui tantôt réunit les trois flux y compris lui-même, tantôt divise les trois flux en saisissant les deux autres comme extérieurs à ma vie intérieure, à ma durée. C’est une espèce de cogito de la durée qui s’exprimerait non plus sous la forme “je pense” mais “je dure”, c’est à dire tantôt je réunis et tantôt je sépare les flux dans une même durée. En d’autres termes c’est par l’intermédiaire de ma conscience que j’ai le pouvoir de saisir tantôt les flux comme un et tantôt comme plusieurs. Pourquoi j’introduis ça ? Parce que là, alors, on a la formule complète. Si ma durée c’est cette capacité de se diviser, de se subdiviser en flux, ou de réunir les flux en un, vous voyez bien comment ma conscience est comme l’élément actif qui fait communiquer les trois niveaux de, ce que j’appelle provisoirement, de l’image.

– Rappelez vous : Les trois niveaux de l’image c’est, encore une fois,
– les objets pris dans des ensembles c’est à dire dans des systèmes artificiellement clos.
– Le Tout d’autre part, à l’autre extrémité, comme durée, comme changement, comme perturbation. Puisque le Tout ne peut se définir qu’en fonction de ces perturbations. Le Tout est fondamentalement passage, le Tout est fondamentalement changement de tension, et justement un changement de tension ce n’est pas localisable. Un changement de tension, une différence de potentiel, ce n’est pas localisable. Ce qui est localisable c’est les deux termes entre lesquels la différence s’établit. Mais la différence même concerne un Tout. Le Tout marche par différence. Il fonctionne par différence.

– Donc le Tout, c’est-à-dire l’Ouvert, le changeant, la durée. Le mouvement, troisièmement ou plutôt deuxièmement entre les deux, le mouvement dans l’espace… le mouvement de translation… je dis que le mouvement de translation rapporte les objets à la durée et rapporte la durée aux objets. Quand les objets se rapportent à la durée c’est comme si… les flux se réunissaient en un, quand la durée, le Tout, se rapporte aux objets c’est comme si, au contraire, la durée se divisait en sous durées, se divisait en flux distincts, et vous avez le mouvement perpétuel par lesquels les flux se divisent et par lesquels les flux se réunissent. En d’autres termes, c’est comme ma conscience, au sens le plus psychologique qui soit, c’est ma conscience psychologique qui assure la ventilation des trois niveaux.

– Si bien que je peux dire maintenant et c’est pas par hasard, c’est que de même que je disais, le vivant a une affinité avec le Tout, à plus forte raison, les systèmes psychiques ont une affinité avec le Tout. Si bien qu’à la limite même d’une espèce de manière progressive très bizarre, je pourrais composer les vivants et à plus forte raison les êtres psychiques, je pourrais les composer entre eux jusqu’à ce que j’arrive à une seule et même durée qui sera le Tout avec un grand T. En tous cas pour le moment, on a juste commenté cette troisième thèse de Bergson… à savoir non seulement l’instant est une coupe immobile du mouvement, mais, le mouvement est une coupe mobile de la durée. Thèse qui reprend l’ensemble puisque… Le mouvement est une coupe mobile de la durée ? Oui, parce que : il rapporte les objets isolés ou isolables à la durée fonctionnant comme Tout et rapporte la durée fonctionnant comme Tout aux objets dans lesquels la durée va se diviser en sous durées.

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