Le gouvernement des animaux
Jusqu’à présent la politique a consisté à mettre en avant la souveraineté des sujets humains : que l’action qui affecte des sujets soit décidée par ces sujets. Toutefois, cette souveraineté entre dans une ère contradictoire dans la mesure où son développement semble mettre en cause les conditions de survie matérielle de l’espèce, c’est ce qu’on nomme l’anthropocène. Tout se passe comme si l’espèce humaine se dévorait elle-même, en cherchant à déployer des conditions de survie, elle détruit ses conditions.
Ne serait-il pas possible d’élaborer un gouvernement des animaux, c’est-à-dire un politique faisant des ahumains des sujets au même titre que les humains? Cette extériorisation de la politique anthropologique n’aurait-elle pas comme avantage de garantir aussi à long terme la survie de cette espèce d’animaux que sont les humains? La crise écologique qui met en cause le biotope affecte l’ensemble des espèces vivantes et une manière de la résoudre serait de prendre en compte toutes les espèces sans faire de hiérarchie. On voit l’avantage pratique de cette règle qui semble résoudre deux problèmes à la fois, parce qu’ils sont un seul et même problème : l’humain et l’ahumain compris comme vivants.
Sans doute est-ce la question même du vivant que la souveraineté politique n’a pas posé tant elle est obsédée par la conscience. La politique se limitait au contrat entre des individus conscients. Mais le vivant est hors de lui, il met en cause l’identité et donc la répartition entre humain et animal.
Ceci questionne bien sûr notre conception de la politique et de la souveraineté en lien avec le développement de la subjectivité comme nihilisme. N’est-ce pas l’anthropocentrisme qui produit les fondements de la crise actuelle qui s’apparente à une extinction? La souveraineté humaine n’est-elle pas la face positive d’un processus négatif d’exclusion de tout ce qui est ahumain, ahumain qui fait retour dans la crise du biotope?