Un souvenir sans mémoire
Il se souvenait des épaules et de la peau. Sa nuque, main passée pour la découvrir, le souffle. Cela revenait souvent et il l’oubliait rapidement, reprenant sa vie. Il savait qu’elle y pensait aussi et que comme lui elle oubliait. Il aurait voulu la rencontrer dans la rue par hasard, s’asseoir à un café, et de manière naive lui demander si elle avait aussi ces images certains matins. Elle aurait sans doute répondu par la négative, sa vie étant faite, les enfants, le mari. Il aurait eu l’air unb peu stupide. Il aurait su dans le même instant qu’elle avait toutes ces images parfois et qu’elle avait été pourtant parfaitement sincère dans sa réponse. Elle oubliait ces matins, rien de plus. C’était devenu comme une atmosphère de sa vie. Ouvrir les yeux et les refermer pour sentir à nouveau la chaleur de ces mains, les respirations proches, la chaleur du bas du ventre et l’enroulement des corps comme si chacun se soutenait de l’autre. Puis la journée commençait et elle n’y pensait plus, elle ne pensait pas même à ses images matinales. Elle avait oubliée. C’était sans doute fréquent et ceci n’avait aucune importance puisque la vie était passée par là. L’amour pouvait être une spéculation mais en se maintenant dans le possible il était un souvenir sans mémoire.