Le socle et le possible / The base and the possible
Le socle est un cube blanc comme retourné sur lui-même, exposant son extériorité et témoignant du même désir moderniste d’autonomie que l’espace d’exposition.
En effet, le volume posé sur un socle est comme séparé du lieu et, quels que soient la forme et l’habillage du cube, qui ces dernières années est devenu un enjeu décoratif (grillage et autre structure métallique kitsch), il a pour influence de séparer l’objet de l’espace. Cette scission relève d’une conception classique de l’œuvre d’art envisagée comme éternelle et ce petit objet, le socle, lui-même placé dans le cube blanc de l’espace d’exposition, emboîtant un cube dans un autre cube, est telle une membrane neutre dans laquelle l’objet se retire et s’enfonce.
J’imagine un objet passible, s’adaptant à d’autres formes, déjà présentes, celles de l’espace, des objets déjà là, d’un monde qui ne nous attendait pas. Ainsi le volume ne serait plus autonome, il n’aurait plus comme fonction d’aller de lieu en lieu, d’exposition en exposition comme s’il pouvait exister indifféremment ici ou là.
Cette passibilité consisterait à faire communiquer deux mondes qui n’ont pas les mêmes repères : le monde matériel que nous connaissons, et cette autre matérialité mondaine qu’est l’ordinateur. Cette rencontre permettrait de réaliser des adaptations et des transformations infiniment plus variées que celles rendues possibles par l’empreinte d’un moulage ou de l’in situ parce que l’informatique permet d’incorporer des modèles de simulations physiques réalistes ou non. Ainsi l’objet rencontrera l’espace modélisé et comme reproduit dans l’ordinateur en tombant, selon des gravités variables, et pourra dans un troisième temps être imprimé pour revenir à l’environnement classique. Cette rencontre fera signe d’un autre monde, d’une autre physicalité, trace d’un événement qui pourrait avoir lieu : le possible qui reste possible.
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The base is a white cube as if turned inside out, exposing its exteriority and testifying to the same modernist desire for autonomy as the exhibition space.
Indeed, the volume placed on a base is as if separated from the place and, whatever the shape and the dressing of the cube, which in recent years has become a decorative issue (wire mesh and other kitschy metal structure), it has the influence of separating the object from the space. This separation is part of a classical conception of the work of art seen as eternal and this small object, the base, itself placed in the white cube of the exhibition space, fitting one cube into another cube, is like a neutral membrane in which the object withdraws and sinks.
I imagine an object that can be made to fit other forms, already present, those of space, of objects already there, of a world that was not expecting us. Thus the volume would no longer be autonomous, it would no longer have the function of going from place to place, from exhibition to exhibition, as if it could exist indifferently here or there.
This passibility would consist in making two worlds communicate that do not have the same reference points: the material world we know, and this other mundane materiality that is the computer. This meeting would make it possible to carry out adaptations and transformations infinitely more varied than those made possible by the imprint of a casting because computers make it possible to incorporate models of physical simulations, whether realistic or not. Thus the object will meet the modelled space and as reproduced in the computer by falling, according to variable gravity, and can in a third time be printed to return to the classical environment. This encounter will be a sign of another world, another physicality, a trace of an event that could take place: the possible that remains possible.